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Le génie de l'Orient

l’Europe moderne et les arts de l’Islam
Introduction

Au cours du XIXe siècle, l’Europe découvre un nouvel univers visuel, celui des arts de l’Islam.

Le marché de l’art et les collections privées contribuent à forger un nouveau regard et un nouveau savoir à  travers les voyages et les expéditions, le développement de la photographie, les publications, les expositions.
À l’occasion de voyages, nombre de collectionneurs constituent des ensembles d’œuvres souvent spectaculaires qui témoignent de l’émerveillement de l’Occident pour l’Orient. L’exposition suggère que nous demeurons aujourd’hui les héritiers de ces nouveaux codes visuels.

 

La découverte des arts de l’Islam donne naissance à deux révélations :
- l’une, diffusée surtout par la peinture, s’inspire des décors des palais et harems pour une vision fantasmée de la fable orientaliste ;
- l’autre est portée par les théoriciens de l’ornement et certains artistes d’avant-garde. Ils recherchent dans l’art de l’islam une nouvelle esthétique qui pourrait transformer les codes de représentation occidentale. Tapis et tissus, céramiques, métaux, marqueteries de bois ou encore d’ivoire introduisent un nouveau répertoire de formes, de motifs et de techniques.

L’exposition illustre ces deux visions à travers différents parcours individuels ou collectifs : Pionniers, voyageurs, photographes ou collectionneurs sont fascinés par l’originalité de cette nouvelle culture visuelle alors même que l’histoire de la représentation est en crise.

Le parcours s’achève avec l’évocation d’un moment d’espoir utopique : celui où des artistes, comme Henri Matisse ou Paul Klee, ont rêvé, peu avant la Première Guerre mondiale, d’une fusion entre regard « occidental » et regard « oriental ».


Commissariat :

Salima Hellal, conservateur du patrimoine, chargée des collections d'objets d'art, musée des Beaux-Arts de Lyon,
Rémi Labrusse, professeur d'histoire de l'art contemporain à l'Université de Paris X Nanterre.

Cette exposition est reconnue d’intérêt national par le ministère de la Culture et de la Communication/ Direction générale des patrimoines/ Service des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d’un soutien financier exceptionnel de l’État.

Du 2 avril 2011 au 4 juillet 2011
Information horaires

Exposition ouverte du mercredi au lundi de 10h à 18h, le vendredi de 10h30 à 18h00.
Fermée les mardis et jours fériés. 

Bloc contenu

Parcours dans l'exposition

Shuja'iibn Mana al-Mawsili, Aiguière, Irak du Nord (Mossoul), 1232, Alliage cuivreux martelé, gravé et incrusté d'argent et de cuivre, Londres, British Museum
Shuja'iibn Mana al-Mawsili
Aiguière, Irak du Nord (Mossoul), 1232, Alliage cuivreux martelé, gravé et incrusté d'argent et de cuivre, Londres, British Museum

1. Éveils : aux sources de l’histoire des arts de l’Islam

Les œuvres islamiques commencent à être collectionnées et étudiées scientifiquement en Europe à partir de la fin du XVIIIe siècle. On les considère d’abord comme des documents historiques et linguistiques ; progressivement cependant, leur dimension artistique commence à être prise en compte.

 

2. Études : premières approches architecturales

L’expansionnisme politique, économique et militaire européen favorise les voyages dont les artistes ont pour mission de raconter l’histoire en images. Une géographie fétiche de « l’Orient » islamique se met alors en place, où de grands pôles d’attraction – Grenade, Le Caire, Istanbul, Ispahan notamment – tiennent le devant de la scène. Cette renommée n’est pas due seulement à une aura de légende mais à des études architecturales minutieuses, animées par une passion de l’exactitude.

 

3. Récoltes : Albert Goupil, Collectionneur

Au XIXe siècle, l’afflux d’œuvres islamiques en Occident est grandement facilité par la domination impériale qu’exercent progressivement les puissances européennes sur l’Afrique et l’Asie. Précédant les musées, certains amateurs privés constituent de spectaculaires collections motivées par le culte impérieux du « bel objet », mais également par l’angoisse de voir disparaître des cultures que l’Europe moderne contribue elle-même à fragiliser. L’appropriation matérielle reflète ainsi un double désir de captation culturelle et de préservation patrimoniale.

 

Jean-Léon Gérôme, Bain maure, vers 1880-1885, Huile sur toile, San Francisco, Museum of Fine Arts
Jean-Léon Gérôme,
Bain maure, vers 1880-1885, Huile sur toile, San Francisco, Museum of Fine Arts

4. Fantasmes : les arts de l’Islam dans la peinture orientaliste

La peinture dite « orientaliste » se donne pour but de bâtir un monde parallèle, une échappée dans un rêve, qui va de pair avec un rejet de la modernité occidentale en marche : « tout excepté notre pauvre petit maigre et triste monde », comme l’écrit Jules Renard en 1889. Les arts de l’Islam sont alors enrégimentés dans la puissante machinerie visuelle de ce rêve exotique : théâtre d’automates où femmes voluptueuses, religieux exaltés et esclaves à la peau noire tournent indéfiniment sur fond de mosquées, de moucharabiehs et de palmiers. 

 

5. Reflets : les Fortuny, de Grenade à Venise

Chez le peintre catalan Mariano Fortuny y Marsal et chez son fils, le décorateur Mariano Fortuny y Madrazo, se reflètent les contradictions de l’orientalisme artistique européen. D’un côté, ils sont tributaires d’un système idéologique qui joue avec les clichés et les fantasmes. De l’autre, ils sont profondément bouleversés par leur rencontre avec ces arts qu’ils collectionnent avec passion et qui modifient leur regard.

6. Figures : le modèle des « miniatures »

Les Européens se sont attachés avec prédilection, au XIXe siècle, à l’idée trop simple que l’art islamique était hostile à la figuration des êtres animés. Cette idée permettait d’opposer un monde d’images figuratives, en Occident, et un monde sans images, en « Orient », suscitant, pour cette raison même, à la fois l’admiration et le mépris. Au fur et à mesure du progrès des connaissances visuelles, ce cliché a cependant été remis en cause.

 

Owen Jones, Moresque n° 1, projet pour The Grammar of Ornament, 1856. Encre et aquarelle sur papier. Londres, Victoria & Albert Museum. © v&a images/Victoria and Albert Museum, London
Owen Jones
Moresque n° 1, projet pour The Grammar of Ornament, 1856. Encre et aquarelle sur papier. Londres, Victoria & Albert Museum.
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+44 (00 207 942 2479

7. Grammaires (1) : l’Islam Arts & Crafts

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, la France et le Royaume-Uni promeuvent les modèles islamiques pour améliorer la qualité – et donc la compétitivité – de leurs productions manufacturées. Par leur rationalité, ces modèles peuvent s’adapter aux systèmes de production industriels. Par leur richesse ornementale, ils doivent stimuler l’invention des décorateurs ou « designers » modernes.

 

8. Grammaires (2) : l’Islam et le rationalisme décoratif français

Le mouvement des « réformateurs » anglais, en matière décorative, a son parallèle en France, sous l’égide du rationalisme défendu par l’architecte Viollet-le-Duc. Avant tout attaché à l’architecture gothique, ce dernier encourage aussi, à partir des années 1860, des études sur les traditions non-occidentales. Il célèbre la « parfaite simplicité » des principes architecturaux et décoratifs islamiques, en s’opposant à la vision « féerique » des orientalistes, ces « partisans de la fantaisie en tout ».

L’œuvre de Jules Bourgoin, inspirée par l’Égypte islamique, témoigne de la singularité du regard de cet artiste, écartelé entre une lecture rationaliste et une appropriation subjective des ornements de l’Islam.

 

Paul Klee, Mit dem grünen Quadrat [Au carré vert], 69, 1919, Aquarelle sur papier, Gretchen & John Berggruen, San Francisco
© BPK / Réunion des Musées Natio
"Mit dem grnen Quadrat"
© BPK / Réunion des Musées Nationaux

9. Pratiques : "Renaissance orientale", les ambiguïtés d’un mythe

L’idée de « Renaissance orientale » apparaît au XIXe siècle. Elle consiste à penser que « l’Orient » peut jouer, pour l’Europe moderne, le rôle que l’Antiquité gréco-romaine a joué au XVe siècle.

Cette idée est d’abord philosophique et littéraire, centrée sur l’Inde. Puis elle se déplace vers les arts décoratifs, et fait référence à l’Islam. Les arts du feu – céramique et verre – sont particulièrement concernés.

 

10. « Révélations » : selon Matisse, selon Klee

Depuis la Renaissance, l’art européen est dominé par la question de la ressemblance dans les images : la mimésis. Au début du XXe siècle, la remise en cause de ce principe d’imitation conduit certains artistes à explorer les approches élaborées par d’autres cultures. Découvrant les arts de l’Islam, Paul Klee et Henri Matisse y puisent, chacun à leur manière, un encouragement à transformer radicalement le rapport occidental avec les images, en dépassant l’opposition traditionnelle entre décoration et représentation.

 

 

 

Bloc dossier de l’exposition