Ce portrait fixe les traits de la fille du propriétaire du Père Lathuille, un restaurant situé dans le quartier des Batignolles à Paris, dans lequel Édouard Manet aimait à se retrouver avec ses amis. Au même moment, le peintre représente une scène prise dans le jardin intérieur du lieu, Chez le père Lathuille (1879, Tournai, musée des Beaux-Arts), qui constitue l’un des témoignages de son goût pour l’illustration de la vie moderne. Les cafés constituent en effet un nouveau lieu de sociabilité dans lequel aiment à se retrouver les artistes, particulièrement dans ce quartier parisien nouvellement loti autour de la gare Saint-Lazare.

La jeune femme a affirmé postérieurement n’avoir jamais posé pour Manet. Il semble que l’artiste ait réalisé de simples dessins à son insu, avant de travailler à ce portrait en atelier. La grande simplicité de la composition, qui présente le personnage sur un fond neutre, met en valeur la virtuosité du peintre dans la traduction des nuances de blanc de sa robe et de son chapeau, tous deux de mousseline. La facture très libre révèle les traits du pinceau laissés apparents, ainsi que la légèreté de la touche et l’économie des moyens. Manet parvient à créer des effets de transparence qui suggèrent le volume et la matière. Une certaine mélancolie peut être relevée dans l’expression du modèle, laquelle a été analysée comme un signe de modernité dans l’approche du portrait féminin, par le refus de la coquetterie et du décoratif.