#Exposition archivée

Exposition Métissages

affiche expo Métissages
Introduction

L’exposition Métissages propose la découverte des collections singulières d’un couple de collectionneurs, amateurs passionnés et donateurs : Denise et Michel Meynet. Constituées d’œuvres d’art où le matériau joue souvent le premier rôle, elles présentent des objets d’origines diverses, de l’art africain à la culture urbaine en passant par la céramique et les estampes contemporaines. En 2011, Denise et Michel Meynet ont fait une importante donation de céramiques au musée. Quelques pièces seront révélées au public à l'occasion de l'exposition.

From 22 February 2013 to 19 May 2013

Les univers s’y entremêlent : une marionnette ou une pirogue bozo, un tabouret dogon (Mali), une poupée de fertilité en os du Sénégal partagent le même espace que les céramiques contemporaines de Champy, Virot ou Deblander. Quelques meubles japonais côtoient art toys et estampes du XXe siècle. Certaines pièces sont elles-mêmes issues de croisements : objets traditionnels africains marqués par l’empreinte occidentale, parfois faits de matériaux modernes (plastique, canette), œuvres occidentales réalisées à partir de matériaux de récupération…

Exigeants, Denise et Michel Meynet ont acquis leurs céramiques auprès des meilleurs galeristes spécialisés. Concernant leur collection d’art africain, ils se qualifient comme un « couple d’autodidactes » se lançant dans une collecte plutôt raisonnée : les objets sont documentés, inventoriés et classés.

Ce n’est pas l’œuvre d’art qui est recherchée à tout prix mais l’objet du quotidien pour ses valeurs d’usage, l’étrangeté du parti plastique adopté par leur auteur. La collection est avant tout un cadre de vie nécessaire : « il nous faut au moins 200 pots pour vivre » déclare Michel Meynet, et leur collection de céramiques, dont une partie fut généreusement offerte en don au musée en 2011, a pu atteindre 600 numéros. Les œuvres se répondent dans des installations sans cesse renouvelées. L’exposition souligne ces dialogues d’où naissent des tableaux scénographiques chaque fois inédits, comme autant de métissages.

Avec Métissages, les collections Denise et Michel Meynet, le musée des Beaux-Arts de Lyon poursuit un cycle d’expositions consacré aux collectionneurs privés, initié en 2010 avec  Un siècle de paysages et poursuivit l’année suivante avec  Ainsi soit-il, Collection Antoine de Galbert, extraits.

Commissariat de l'exposition
Salima Hellal, conservateur du patrimoine, chargée des collections d'objets d'art, musée des Beaux-Arts de Lyon

 

Catalogue de l’exposition
Sous la direction de Salima Hellal
Editions Fage, 168 pages, 25€
A lire chez Fage éditions - musée des Confluences
L'Art colon de Denise et Michel Meynet

Bloc dossier de l’exposition
Bloc contenu 2

Parcours dans l'exposition

Les quatre premières sections de l’exposition sont présentées au deuxième étage du musée, dans la salle des expositions-dossiers. La section intitulée Métis est présentée au même étage, dans la salle 200.

Bracelets de prêtresse vaudou, Bénin, peuple Fon. 1ère moitié du XXe siècle. Métal à forte teneur en argent (avec le cas échéant des pièces françaises ou anglaises) © Collection Meynet – Photos Alain Basset
Bracelets de prêtresse vaudou
Bénin, peuple Fon. 1ère moitié du XXe siècle. Métal à forte teneur en argent (avec le cas échéant des pièces françaises ou anglaises)
© Collection Meynet – Photos Alain Basset

1. Séries

Avec Métissages, les collections Denise et Michel Meynet, le musée des Beaux-Arts de Lyon poursuit un cycle d’expositions consacré aux collectionneurs privés. L’exposition propose la découverte des collections singulières de ce couple où les univers s’entremêlent. Constituées par deux personnes, les collections Meynet abordent des domaines très variés : art asiatique et africain, céramiques et estampes contemporaines. Dans chacun de ces corpus, des ensembles sont construits. Selon le couple, l’objectif de la collection n’est pas l’accumulation mais l’amélioration des ensembles déjà constitués. Ceux-ci évoluent, des pièces pouvant être vendues ou données. En 2000, Denise et Michel Meynet ont ainsi fait une donation de 685 objets africains au musée Guimet de Lyon futur musée des Confluences. En 2011, ils ont gratifié le musée des Beaux-Arts d’un bel ensemble de céramiques contemporaines.

Ces libéralités permettent à Denise et Michel Meynet d’aborder en pionniers des territoires nouveaux, peu explorés : œuvres de céramistes contemporains, art africain dit « colon » car fortement marqué par l’empreinte occidentale due à la colonisation, Street Art enfin, chaque territoire se distinguant en séries dans leurs collections.


 

Vannerie pour ikebana. Japon, XXe siècle. Bambou tressé © Collection Meynet – Photo Alain Basset
Vannerie pour ikebana. Japon, XXe siècle. Bambou tressé

2. La beauté de l’ordinaire

Les collections Meynet sont nées de la fascination du couple pour le Japon, en particulier pour « l’art populaire » de ce pays, une notion créée au début du XXe siècle par Soetsu Yanagi (1889-1961). Cet intellectuel japonais a inventé un néologisme pour le désigner : mingei, composé du min de minshu (peuple) et du gei de kogei (artisanat).

Selon lui, les objets mingei sont ceux dont se servent au quotidien les gens du peuple. Leurs créateurs sont des artisans anonymes qui ont accordé une grande attention à leur fabrication. Les caractéristiques de l’objet mingei sont le naturel, la droiture, la simplicité, la solidité : « c’est une beauté de l’ordinaire », écrit l’érudit.

L’originalité de Denise et de Michel Meynet est d’avoir transposé les critères du mingei japonais aux objets africains du quotidien, peu convoités lorsqu’ils commencent leur collection au début des années 1990. Chaque objet a été choisi parce qu’il porte une patine, témoin du temps, des traces d’usage, souvenirs de sa fonction première. L’objet est beau pour les qualités d’exécution mises en œuvre et dans sa simplicité.







 


 

Poupées. Nigeria, 2e moitié du XXe siècle. Os, cuir, perles, cauris, anneaux en laiton, monnaies datées de 1949, 1951 et 1952 © Collection Meynet – Photo Louis Houdus
Poupées. Nigeria, 2e moitié du XXe siècle. Os, cuir, perles, cauris, anneaux en laiton, monnaies datées de 1949, 1951 et 1952

3. Matières

Pour constituer leurs collections, Denise et Michel Meynet ont été portés par leur goût pour la matière et les techniques : le bois, le métal, l’ivoire, la céramique. Ils ont recherché les objets patinés par le temps et l’usage et ceux réalisés à partir de matériaux insolites.

À cet égard, les Meynet peuvent être regardés comme les héritiers des « curieux » de la Renaissance et du Grand Siècle. Ces périodes voient se former les premières grandes collections encyclopédiques : il ne s’agit pas de réunir uniquement des œuvres d’art mais bien d’illustrer la diversité du monde. Cette dimension de speculum mundi, de miroir du monde, est alors assumée par le « cabinet de curiosités » qui distingue l’artifice et la nature : d’un côté la matière transformée par l’homme et de l’autre les matières naturelles. Les savants comme les princes rassemblent les curiosités les plus hétéroclites en privilégiant les objets inclassables, les artéfacts et les matières exotiques comme l’ivoire d’éléphant ou l’œuf d’autruche, parfois pris pour l’œuf d’un griffon ou d’un autre animal fabuleux.



 

Dans la collection Meynet, certains objets oscillent entre naturalia et artificialia : l’œuf d’autruche transformé en flacon par les populations bochimans qui l’utilisent comme « boîte à riz », un bouclier provenant d’Afrique de l’est fabriqué à partir d’une carapace de tortue, ou encore des fémurs, devenus des poupées de fertilité au Nigeria.


4. Formes/ Volumes/ Couleurs

Dieu vaudou Dan sous son aspect femelle. Bénin (département de Zou, village Tindji), peuple Fon. 20e siècle. Fer forgé, plumes et charge magique. Lyon, musée des Confluences © Département du Rhône - musée des Confluences / Photo Patrick Ageneau
Dieu vaudou Dan sous son aspect femelle. Bénin (département de Zou, village Tindji), peuple Fon. 20e siècle. Fer forgé, plumes et charge magique. Lyon, musée des Confluences

Comme dans les cabinets de curiosités d’autrefois ou les compositions des artistes surréalistes, les collections Meynet font coexister des œuvres produites par des artistes occidentaux et par des cultures lointaines. De ces rapprochements naissent des affinités qui ne sont pas fortuites.

Depuis la découverte de l’art africain par les artistes modernes, l’art occidental s’est en effet affranchi des conventions de la représentation classique héritées de l’art gréco-romain. Pablo Picasso, Georges Braque, Henri Matisse, André Derain ont admiré les premiers l’originalité plastique de l’art africain. Ils ont trouvé dans les masques des peuples baoulé, ibo et fang une source exceptionnelle d'inspiration. L’adoption des principes propres aux arts dits alors « primitifs » explique la naissance du cubisme, lequel a ouvert la voie à plusieurs courants artistiques majeurs du XXe siècle, dont l’abstraction.

Denise et Michel Meynet ont acquis exclusivement des objets et des œuvres présentant à leurs yeux un équilibre parfait entre la forme et le volume. La couleur est également importante, même si elle n’est pas primordiale dans le choix de l’objet. Les collections comptent ainsi un grand nombre d’objets blancs. Dans l’art africain, le blanc, traditionnellement obtenu grâce au kaolin ou à la craie, est lié aux ancêtres, aux dieux, à la mort associée à l’idée de renaissance. Le noir, fabriqué à partir du noir de fumée, du charbon de bois ou des écorces de liane, suggère les ténèbres et la sorcellerie.






 


5. Métis

Les premiers contacts entre Africains et Européens remontent au XVe siècle, quand les Portugais s’aventurent le long du littoral occidental de l’Afrique. Les ivoires afro-portugais, qui combinent motifs d’inspiration africaine et occidentale, sont les premiers objets « métissés » nés de cette rencontre.

Armand Avril (né en 1926), Barque des morts. 2010. Bois et tissus peints © Collection Meynet  -Photo Louis Houdus.
Armand Avril (né en 1926)
Barque des morts. 2010. Bois et tissus peints

Rapidement, les grandes puissances européennes implantent des comptoirs commerciaux et tirent profit, grâce au troc, des ressources locales (y compris des vies humaines dans le cadre de la « traite négrière »). Les Africains sont fascinés par la supériorité matérielle des Britanniques, des Hollandais ou des Français qui impressionnent avec leurs navires imposants, leurs armes à feu et leurs monnaies.

À la fin du XIXe siècle, le partage des territoires de l’Afrique est officialisé et, dès le début du siècle suivant, l’art africain est fortement marqué par la présence coloniale. Les artistes produisent des statuettes que les Européens ont qualifiées de "colons" car ils les ont interprétées, souvent à tort, comme des portraits d’hommes blancs. Couverts de peinture industrielle, ces personnages à la peau noire, sculptés en ronde-bosse, sont vêtus "à l'occidentale" et arborent des signes de modernité et de réussite sociale (vêtements à la mode, coiffures plaquées, accessoires tels que montres et sacs à main). Réciproquement, certains artistes occidentaux du XXe siècle se sont inspirés de l’art africain, et notamment de l’art de la récupération, pour créer des œuvres qui intègrent des objets ou des matériaux détournés de leur usage premier. Ces objets « Métis » occupent une place de choix dans la collection du couple Meynet et font l’objet d’une scénographie particulière dans l’exposition dans la salle 200.